Cricri - L'envers du décor

Le premier qui me fait la remarque que mon texte est plus long que la musique, je l'égorge.



L’enfant sautillait sur le trottoir, joyeuse. Il devait être dans les alentours de seize heures, d’après le soleil qui se reflétait sur ses cheveux soyeux, créant ainsi des reflets plus blonds encore qu’ils ne l’étaient déjà. Les rayons caressaient la douce peau de l’enfant, la réchauffant en même temps. Elle avançait, heureuse, saluant tous les passants qu’elle croisait de sa petite voix chantonnante, ce qui faisait sourire les adultes, attendris. Son visage diaphane était illuminé d’un grand sourire qui étirait ses jolies lèvres rosées. Ses grands yeux bleus pétillaient de bonheur. Ses cheveux virevoltaient derrière elle, et elle replaçait de temps à autre avec ses doigts si fins une mèche qui s’égarait sur son front.

De l’autre côté de la rue, une petite fille progressait sur la route. Bien qu’il soit seize heures et des poussières, elle avançait dans une rue plongée dans l’obscurité, d’un pas lent et traînant. Ses longs cheveux ternes encadraient son visage sale, sa peau noire se fondant dans la noirceur ambiante. Elle avançait, tête baissée, bousculée par tous ces adultes qui n’adressaient pas un seul regard, à cette enfant insignifiante. Sa figure était mangée par les cernes, ses lèvres charnues semblant prendre une trop grande place de même que ses yeux sombres et tristes, sur ce visage creux. Ses cheveux lourds et emmêlés tombaient sur ses épaules, certains s’égarant sur son visage, sans qu’elle ne prenne le temps d’enlever ses mains sèches de ses poches pour se recoiffer.

Elle était contente, sa maman lui avait offert aujourd’hui une nouvelle robe, qu’elle avait fièrement revêtu pour parader auprès de ses amis. Elle avait donc sur elle une robe blanche, avec un petit nœud rose au niveau de la taille, avec un gilet rose pour protéger ses bras nus. Lorsqu’elle l’avait mise devant sa mère, celle-ci s’était exclamée « Oh, tu es superbe ! Une vraie poupée ! ». Et c’est vrai que c’était la première idée à laquelle pensaient les gens en la voyant. Une vraie poupée de porcelaine.

Ailleurs, une petite fille était enfermée dans un bâtiment depuis de longues heures maintenant. Elle ne voyait pas le temps passer, étant coupée du monde extérieur. Autour d’elle se trouvait de nombreux enfants, comme elle, penchés sur leurs ouvrages. Vêtus de haillons, ils travaillaient en silence, les muscles de leurs bras en feux, les doigts fébriles, les jambes tremblantes. Tous confectionnaient des vêtements soyeux et coûteux pour les pays Européens.

Ses camarades de classes avaient été béats d’admiration. Sa maîtresse l’avait complimentée. D’ailleurs, elle était beaucoup aimée dans son école. Sage et disciplinée, elle était un exemple pour les maîtres et maîtresses. Joueuse et sympathique, elle était l’amie idéale de tout enfant. Gentille et adorable, tout le monde l’appréciait. Elle avait même été félicitée par le directeur après avoir aidé un de ses camarades, embêté pas des personnes plus grandes. Elle n’aimait pas trop ça, être mise de cette manière sur le devant de la scène, étant timide.

Assise sur le trottoir, une petite fille attendait, main tendue, à la sortie d’une bouche de métro. Deux mois maintenant qu’elle venait ici tous les jours. Avant, elle allait à l’école. Elle n’était pas aimée des autres élèves, mais elle aimait bien, elle, l’école. Elle aimait étudier, apprendre, écouter. Mais sa mère lui avait dit qu’elle ne pourrait plus y aller. « Elle a beau passer sous le bureau du directeur, ta maman, on veut plus de toi ici ! » lui avait dit un garçon avant qu’elle ne quitte définitivement l’école. Elle n’avait pas compris, mais ça ne lui avait pas plu. Parce que lorsqu’elle avait demandé à sa mère ce que ça voulait dire, elle avait rougit.

Sa maman était très fière d’elle. Elle le lui disait souvent. Et elle l’aimait plus que tout. Elle aimait sa voix douce qui lui racontait des histoires le soir. Elle aimait ses mains fines qui la peignaient après la douche. Elle aimait son regard tendre quand elles discutaient. Elle aimait son rire qui emplissait une pièce de bonheur. Elle aimait sa maman, et rien que d’y penser, son cœur de petite fille se gonflait de fierté. Et il en allait de même avec son papa. Son papa qui était grand et fort. Et, ça elle ne le disait à personne, mais c’était le plus beau, et elle comptait bien se marier avec lui plus tard !

Recroquevillée dans un coin d’une pièce, une petite fille pleurait, des sanglots lui échappant de temps à autres. Dans la cuisine, sa mère rangeait la vaisselle, tranquillement. Le corps encore meurtri par les coups qu’elle venait de recevoir, la petite fille se releva et se dirigea, de ses jambes tremblantes, dans sa chambre plongée dans le noir. Elle ne se sentait pas en sécurité, dans cette chambre, pas plus que dans tout autre pièce de la maison. Non, tout ici lui rappelait sa mère qui se fichait d’elle. Et cette chambre, c’était pire que tout. La présence de son père semblait l’emplir. Et il lui semblait sans cesse l’entendre entrer dans la chambre, comme toutes les nuits…

En plus de ça, son papa était cuisinier ! Alors, le soir, quand elle rentrait à la maison, son papa était toujours dans la cuisine, en train de préparer de bons petits plats. Préparés avec soin, et amour. Et sa maman faisait les meilleurs gâteaux du monde ! Ca sentait toujours bon dans la maison. Et elle adorait les moments passés tous ensembles, autour de la table, à discuter de leurs journées respectives et à rire, tout en mangeant.

Une petite fille était penchée au dessus d’une poubelle, son corps n’ayant même plus contact avec le sol. Au bout de quelques secondes, elle se redressa, victorieuse, avec une pomme intacte. Elle décolla un pan de son tee-shirt, laissant voir un court instant son corps. Elle n’avait plus que la peau sur les os. Elle essuya la pomme avec le tissu, avant de mordre dedans à pleines dents. Elle aurait au moins réussi à manger aujourd’hui…

Mais ce qu’elle aimait le plus, c’était les jours de fête. Son anniversaire, ou mieux encore : Noël ! A ces occasions, toute la famille était réunie, tout le monde faisait la fête, tout le monde était heureux. Et elle avait des tonnes et des tonnes de cadeaux. Parfois, elle était mal à l’aise, parce que même ses amis n’avaient pas autant de cadeaux. Mais elle était tellement contente, que ça écrasait tout autres sentiments. Elle avait toujours ce qu’elle demandait. Des vélos, des poupées, des déguisements… Elle entendait parfois les gens autour d'elle dire que sa famille était riche.

La petite fille regarda avec une tristesse immense par la fenêtre. Deux semaines. Deux semaines qu’ils n’avaient plus de nouvelles de son frère. Des images se superposaient dans sa tête. Les messieurs qui venaient prendre le peu de meubles qu’ils avaient. Le départ de son frère pour l’armée. Les cris de sa mère. Le désespoir sur le visage son père. Les larmes de sa grand-mère. Le regard de son frère, alors qu’il s’éloignait. Son regard ancré dans celui de sa sœur. La petite fille priait. Jours et nuits. Pour son frère, parti à la guerre. Pour son jumeau, qui n’aurait pas fait de mal à une mouche.

Mais, une fois, le jour de Noël, elle avait été malade. Oh, ça n’avait pas été drôle ! Surtout, qu’habituellement, elle ne tombait ja-mais malade. Et il avait fallu que ça tombe la veille de Noël. Mais, en attendant, sa mère avait été au petit soin avec elle. Elle lui avait même emmené le petit déjeuné au lit ! Son père lui avait préparé un plat spécial. Et, au final, elle avait réussi à se lever pour déballer ses cadeaux.

Dans un hôpital, une petite fille était allongée dans un lit, les yeux fermés. Un masque à oxygène l’aidait à respirer, des perfusions l’entouraient. Le cardiogramme affichait un rythme régulier. Elle semblait paisible, la petite fille. Personne n’était venu lui rendre visite depuis plusieurs semaines. Mais elle semblait paisible. Elle était tout en bas de la liste, absolument pas prioritaire. Mais elle semblait paisible. Elle attendait une greffe de cœur, qui ne viendra probablement jamais. Mais elle semblait paisible.


Un adulte bouscula la petite fille sans s’arrêter ce qui la fit revenir à la réalité. Le soleil commençait à décliner, et l’enfant pressa le pas. L’air se faisait un peu plus frais, le vent froid soufflant sur ses jambes dénudées. Elle frissonna en se frictionnant ses bras nus. Une brise de vent plus forte que les précédentes vint soulever sa jupe terne et jouer avec ses cheveux bruns, les emmêlant, la faisant soupirer. Elle allait devoir passer des heures à se coiffer. Elle finit par arriver devant un grand immeuble, poussa la porte, et entra dans l’orphelinat.

Même pas ! J'ai fini le texte quasi en même temps que la musique =D
Outre le fait que je n'aie pas vraiment compris la fin, je trouve ton texte magnifiquement bien écrit, surtout les passages en italiques, ils sont très bien développés ! Ce contraste entre la petite fille qui a tout et celle qui n'a rien fait mal au coeur...

.... Justement, la fin, tu es censée comprendre que la petite fille en question est en fait qu'une orpheline, et que tout ça n'était que son imagination (pour ça que certains mots sont en italiques dans le dernier paragraphe, il contredise ce qu'elle disait avant)
J'ai pas été assez calire, c'est bien ce qu'il me semblait x)

En tout cas, merci !

Ah, d'accord ! Au début j'avais pensé à ça, mais j'pensais être à côté de la plaque, ça me rassure, merci x)

J'avoue que j'avais pas trop trop compris non plus >_<
Néanmoins, j'aime beaucoup

Je l'avais fait lire pourtant, et elle m'avait dit que c'était clair... Zut >.<

Merci Fruti !

Finit le texte en même temps que la musique !

C'est magnifique *o*
L'esprit de contradiction entre la pauvreté et la richesse est admirable, surtout comment tu l'a écrit !
Et ensuite la chute brutale de cette petit fille qui, en fait, n'a rien de tout ça... Tu m'impressionnes !!

... A ce point ? O.o
Merci merci merci >.<

J'aime beaucoup !
Le contraste entre les deux petites filles est impressionnant, et c'est vraiment bien écrit. Par contre, je n'avais pas non plus compris la fin. ^^'

C'est joliment fait...la différence entre les deux petites...la chute à laquelle on ne s'attend pas...
=)