Ecris tue
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 Turn Off - La route des pertes

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MessageSujet: Turn Off - La route des pertes   Turn Off - La route des pertes Icon_minitimeJeu 01 Avr 2010, 17:20



LA ROUTE DES PERTES


C’était l’automne.

J’adorais cette saison en ce lieu.

C’était exactement comme si tous les arbres avaient soudains pris feu et dansaient sous la lueur pâle du jour, tendant leurs branches écarlates vers le ciel nuageux et changeant.
Le vent avait le goût des mets grillés au feu de bois et mes larmes, la saveur amère de l’échec.

Mon cheval en cet instant solennel, ne bronchait pas, la tête penché vers le sol, grave et impérial.
Comme moi. A ceci près que je n’avais pas su retenir l’eau qui s’échappait des mes yeux émeraudes et que mes membres tremblaient sans que je puisse l’empêcher.

Je finis d’harnacher mon destrier et mon regard se posa sur les bâtiments environnants. Gracieux et aériens, ils me surplombaient de toute leur hauteur comme pour me rappeler mon insignifiance en ce monde. Mais cette leçon était la première que j’avais apprise, et jamais, jamais je ne l’aurais oubliée.

Je me hissais sur Espoir, mon étalon, et sa chaleur m’apporta le temps d’une éphémère seconde, un réconfort que je n’espérais plus.
Tout ceci disparu lorsque mes yeux se perdirent encore une fois sur les merveilles architecturales des lieux. La pierre blanche luisait dans le soleil couchant, auréolée du rouge et or des arbres plantés dans la cour. Je retins mon souffle. Tout était silencieux. Seul le chant du vent dans les branches et celui de la rivière voisine venaient troubler cet instant de paix.

J’essuyais rapidement une larme et talonnais Espoir. Le bruit de ses sabots sur les dalles de pierres fut le dernier souvenir que j’emportais de l’endroit. Le battant de l’antique porte gardienne se referma derrière moi, condamnant à la solitude et à l’abandon le lieu sacré qu’elle fermait.

La première page de mon histoire s’était tournée, la longue route des pertes ne faisait que commencer…

En dépassant les collines qui ceignaient le village, je sus que j’avais définitivement enterré mon enfance. Jamais plus je ne repasserais ses portes. Elles m’étaient désormais closes et ce à tout jamais.
Le chemin devant moi se perdait dans l’horizon, si long, long, que je sentis un poids se déposer sur mes épaules, comme si une partie de moi avait enfin compris ce que ce chemin impliquait.

-Allons-y Espoir, puisque tel est notre destin.

Mais au fond, ni lui ni moi n’avions envie de parcourir ce douloureux sentier.

Le chant des oiseaux nous accompagnait et pourtant, je portais toujours ce lourd fardeau et je savais qu’Espoir aussi le ressentait. Ce n’étais certes qu’un animal, mais c’était aussi celui qui depuis ma plus tendre enfance m’accompagnait, me restait dévoué envers et contre tout et qui surtout c’était toujours tenu à mes côtés, sans jamais faillir là ou tous les êtres humains avaient échoués.
Je caressais son encolure, glissant ma main dans sa crinière douce et accueillante. Ses poils sombres contrastaient avec la pâleur de ma peau que le maigre soleil de la contrée n’avait jamais réussi à faire dorer.

La seconde étape de notre périple m’attendait dans une forêt. Les pins majestueux la composant étouffaient les sons et la lumière, rendant l’atmosphère lourde et inquiétante. Mais c’était ma forêt et jamais je n’avais eu à y craindre quoique ce soit. Jadis, mes protecteurs vivaient ici et ils m’avaient appris à apprécier la pénombre, la fraicheur et l’oppression des grands arbres. Certains les nommaient elfes, pour moi, ils étaient juste eux, créatures étranges, chaleureux et vivants.
Ils arrivaient sans bruits dans mon dos et sifflaient comme des oiseaux à mon oreille me faisant sursauter à chaque fois. Puis, ils riaient d’un rire clair et enchanteur qui me retournait le cœur. Ils s’asseyaient dans l’herbe et la mousse et me contaient leur forêt et ses habitants de cette voix profonde et douce qui m’emmenait vers un ailleurs ou soudain, les portes de mon village explosaient et laissaient pénétrer un air de liberté.
Parfois, ils stoppaient leurs contes pour écouter le bruissement des feuilles, immobiles et attentifs, et dans ces moments là, je les regardais fascinée, persuadée que si je les lâchais des yeux, ils allaient disparaitre parmi les arbres.

Cette fois-ci, ils avaient vraiment disparus. J’espérais qu’ils soient allés se réfugier dans les arbres, dans les fleurs ou n’importe où pourvu qu’ils aient survécus. Leurs visages délicats aux prunelles argentées, jamais ne devraient être arrachés à cette terre. Cela ne pouvait simplement pas être.
L’écorce des pins sous mes doigts me sembla rugueuse et agressive. Du temps des elfes, ne puis-je m’empêcher de remarquer, elle était comme de la soie. Mon poing se referma et mes ongles s’enfoncèrent dans ma peau. Mais plus rien ne pouvait me causer de douleur, en quittant la forêt, c’est un bout de mon âme que j’y avais laissé.
Les portes de ce qui m’avait constitué se refermaient derrière moi, c’était l’impression que j’avais en passant entre deux pins courbés. La vérité, c’est que sur la route des pertes, j’abandonnais mon adolescence.

Le chemin pierreux qui m’accueillit après la forêt me rappela que je me dirigeai vers les montagnes. Les vraies, les grandes, les magnifiques, pas celles de mon village aux murs blancs…
Il commençait à faire plus frais et je m’enroulais dans ma cape. Espoir, la tête courbée, grimpait courageusement le flanc de montagne escarpé qui nous mènerait à l’océan. Mais avant, c’était l’océan de nuages qu’il faudrait affronter, sans armes et sans remords, l’océan des mes souvenirs perdus.

Le sommet nous offrit une vue splendide sur l’océan d’un côté, et la forêt de l’autre. Celle que j’avais quitté plus tôt, vide et froide, privée de la chaleur des êtres lumière.

En plissant les yeux, je parvins à voir mon village, emprisonné dans ces murs blancs, perdu à jamais. Les larmes que je croyais taries recommencèrent à couler. Derrière moi je laissais les plus belles années jamais vécues. Devant je le savais, les pertes seraient plus nombreuses mais moins dures et brutales. J’y étais préparée, ce n’étais pas le même type de douleur. Ce que je quittais, c’était ce qui m’avait forgée, poussée à faire tel ou tel choix, à prendre tel ou tel chemin. C’était la base de ce que j’étais, ma force et de ce fait, ma plus grande faiblesse.

Espoir renâcla et mes yeux se détachèrent de cette vision familière. Je devais achever le voyage.

Le vent froid me piquait les yeux et je rabattis ma capuche sur mes boucles blondes. La montagne que je venais de gravir, c’était les épreuves qu’il avait fallu que j’endure pour arriver ici, au sommet. Et devenir adulte, femme et responsable.

J’y avais laissé de nombreux rêves, de nombreuses ambitions, autant de pertes nécessaires qu’il avait fallu accepter.

Je poussais Espoir sur le sentier menant à la mer, promesse d’une longue descente aux enfers. Plus on monte haut, plus la chute est rude, une chose que l’on ne m’avait pas enseigné et qui pourtant m’aurait été bien utile. Les cailloux sur mon passage dévalaient la pente abrupte pour aller s’abimer quelque part ou jamais plus on ne pourrait les retrouver. Tout comme ces règles que j’avais bafouées, ces valeurs ancrées en moi que j’avais piétinées, et ces gens surtout, ces gens que j’avais délibérément écrasés de mon pouvoir. Des pertes atroces, pour moi, pour eux. Je m’en rendais compte en regardant derrière moi ce pan de montagne écorché, brulé et bafoué.

Un élément sur ma route me redonna le sourire. C’était une petite chapelle de briques rouges, une croix élimée à son sommet. La seule chose que je ne regrettais pas dans ma vie. Celle qui m’avait indiqué de nouveau le droit chemin, celui auquel j’aspirais déjà assise sur une vieille souche quelque part dans une forêt peuplées d’elfes.

Il s’appelait Lawn. Elle se nommait Elyon. Mon amour. Le fruit de mes entrailles.

Il portait une chemise bleue ciel le jour où je l’avais rencontré. C’était exactement comme dans les vieilles légendes de ma mère, nos regards s’étaient croisés et ça nous avait frappé sans que l’on ne puisse rien faire. L’amour. Voila son nom. Notre mariage dans cette chapelle fut un bonheur sans nom, Elyon fut un miracle. Un petit miracle qui me fit abandonner mes derniers doutes et me rendit les valeurs que j’avais abandonnées au sommet de cette montagne.

C’est pourquoi dépasser cette église fut extrêmement dur. Mais la route des pertes exigeait qu’on la parcoure sans se retourner, sans possible bifurcation et Espoir recommença sa lente marche. L’océan se rapprochait, je sentais ses embruns sur mon visage, à moins que ce ne soit mes larmes. Je ne savais pas. Le sourire d’Elyon éclairait mon chemin et mon poing se serra sur les rennes de cuir.

Enfin l’océan s’ouvrit à mes pieds et je descendis de cheval. Ma main posé sur son poil soyeux une dernière fois, je contemplais la mer furieuse qui s’agitait sous mes pieds. Je le sentis s’incliner et faire demi-tour. Je fis un pas et dépassais une pierre blanche.




Un océan ? Pourquoi ? Que fais-je ici ?
Quelle est cette route derrière moi ?
Et toi qui me souris dans ma tête, qui es- tu ?
Le chemin doit cesser. J’avance dans les flots. J’ai la tête vide.
Une bribe de souvenir, peut-être, je ne sais plus.
L’eau m’engloutit.
J’ai froid…

La route des pertes se termine toujours ainsi…On finit par perdre ce qu’on a de plus précieux…la vie.
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Alwenah
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MessageSujet: Re: Turn Off - La route des pertes   Turn Off - La route des pertes Icon_minitimeSam 10 Avr 2010, 12:27

Très beau texte, il pourrait être le synopsis d'un roman ! Tes idées sont originales, moi j'aime bien =D
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Cricri
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MessageSujet: Re: Turn Off - La route des pertes   Turn Off - La route des pertes Icon_minitimeSam 10 Avr 2010, 12:37

Oh... Ca va parfaitement bien avec la musique.

Et l'histoire est sublime. C'est vraiment pas un texte, mais une histoire à part entière, qui m'a beaicup émue. Envie de savoir pourquoi. Ce qu'il c'est passé.

(Les comparaisons sont superbes aussi)
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Frutimoon
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MessageSujet: Re: Turn Off - La route des pertes   Turn Off - La route des pertes Icon_minitimeSam 10 Avr 2010, 13:01

J'avoue, une fois de plus, tu m'as bluffée.
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Aloyse
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MessageSujet: Re: Turn Off - La route des pertes   Turn Off - La route des pertes Icon_minitimeDim 11 Avr 2010, 14:13

2è texte que je lis. Je suis éblouie :O
ça va être dur de passer après toi x)
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MessageSujet: Re: Turn Off - La route des pertes   Turn Off - La route des pertes Icon_minitimeLun 12 Avr 2010, 09:14

eh bien... merci.... Embarassed
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MessageSujet: Re: Turn Off - La route des pertes   Turn Off - La route des pertes Icon_minitime

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